Archives pour la catégorie Féodalité

La seigneurie de la Follye à Pierrefonds jusqu’au XVIIè siècle

Dans la dernière livraison des Annales Historiques Compiégnoises, Marc Pilot livre un intéressant travail sur la seigneurie de la Follye, à Pierrefonds, tiré en grande partie des archives familiales de la famille Boitel de Dienval, qui acquit la propriété dans la première moitié du XVIIIè siècle et la possède toujours.

La très grande majorité des documents concernant la Follye et qui faisaient partie de ces archives familiales a été brûlée à la Révolution. Nous ne les connaissons donc que sous la forme de mentions, citées dans un inventaire de 1779, qui est parvenu jusqu’à nous. Néanmoins, un certain nombre d’autres sources permettent de retracer une partie de l’histoire de la seigneurie de la Follye avant son acquisition par la famille Boitel de Dienval.

Généralités 

La première mention de la Follye dans notre documentation est un document conservé aux Archives Départementales de l’Oise daté de novembre 1348 (AD Oise 1Ep81). Il est malheureusement extrêmement difficile à déchiffrer.

Mouvance

On ne connait pas d’aveu et dénombrement du fief de la Follye. L’inventaire de 1779 mentionne des aveux datés de 1408, 1530, 1537, 1577, 1655 et 1737 mais les copies appartenant à la famille Boitel de Dienval ont été brûlées et les originaux n’ont à ce jour pas été retrouvés (par ailleurs il est probable que l’aveu de 1655 ne concerne pas la Follye et corresponde à l’aveu et dénombrement du fief de Belliole daté du 8 juin 1655, dont une copie est conservée aux Archives Nationales).

Dans les archives du Duché de Valois, la Follye est toujours mentionnée comme un fief relevant directement du roi, à cause de sa châtellenie de Pierrefonds, notamment dans une liste non datée (Arch. Nat. R/4/84) nommée « Etat des fiefs relevant en plein fief du duché de Valois ». Dans cette liste on note : « le fief Baudier ou de la Follie, à Pierrefonds ». Nous ne connaissons aucun autre document qui nomme la Follye « le fief Baudier ». Lire la suite

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Histoire des familles : les De La Personne à Ambleny, Taillefontaine et Orrouy

A la lecture des registres de catholicité d’Ambleny (Aisne) de la seconde moitié du XVIIè siècle, on trouve plusieurs mentions d’une famille De La Personne, qui s’était établie au hameau des Fosses. Louis de la Personne, époux de Madeleine Moutonnet, baptise notamment à Ambleny ses trois enfants Louis Joseph (16 novembre 1661),  Charlotte (15 avril 1664) et Jeanne (9 juillet 1668). Un quatrième enfant, François-Hannibal, est baptisé le 21 mars 1666 mais la cérémonie a lieu à Coeuvres : en effet, les parrain et marraines sont le Duc et la Duchesse d’Estrées !

Il existe plusieurs familles De La Personne dont les généalogies sont bien établies. Dans le Valois, une famille De La Personne a possédé la vicomté d’Acy, près de Soissons, comme le mentionne Claude Carlier dans son « Histoire du Duché de Valois ».  Une autre famille de la Personne était issue des seigneurs de Verloing, dans le Pas-de-Calais. Aucune des généalogies de ces familles ne mentionne ce Louis de la Personne d’Ambleny:  quelle est son origine familiale ?

Louis de la Personne, sieur des Fosses, seigneur en partie de Montigny et Russy

Le curé d’Ambleny donne à Louis de la Personne la qualité d’écuyer, et de « seigneur en partie de Montigny et Russy », en précisant que ces lieux sont proches de Crépy-en-Valois. Russy correspond à ce qui est aujourd’hui Russy-Bémont. Montigny correspond à l’ancien village de Montigny-le-Sec, abandonné dans le courant du XVIIIè siècle, dont dépendait Russy. Louis de la Personne est aussi qualifié de « sieur des Fosses », sans qu’il s’agisse d’un quelconque titre féodal. Habitant au hameau des Fosses, il prenait ce titre, comme le faisait auparavant son beau-père Hector Moutonnet, « hommes d’armes pour le service de sa majesté », qui souhaitait se différencier ainsi de son homonyme Hector Moutonnet, qui était le notaire d’Ambleny à la même époque.

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Lors de la recherche de la noblesse par l’intendant Dorieux, Louis de la Personne avait d’abord été condamné, faute de pouvoir prouver ses titres. Il avait fait appel au Conseil d’Etat et le résultat lui fut sans doute favorable car à sa mort à Ambleny le 7 février 1705, à l’âge de 75 ans, le curé d’Ambleny lui donne toujours la qualité d’écuyer. Nous verrons dans la suite de ce billet qu’à l’heure actuelle nous sommes incapables de réunir des preuves formelles de noblesse de Louis de la Personne.

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La féodalité à Pierrefonds (XIIIè – XVIIè siècle)

La Société d’Histoire et d’Archélogie du Valois publie dans son dernier bulletin « Histoires du Valois » (n°4, 2015) mon travail sur la féodalité à Pierrefonds entre le XIIIè et le XVIIè siècle, réalisé principalement à partir du dépouillement de quelques cartons de la série R/4 des Archives Nationales. J’en publie ici les premiers paragraphes (soit environ un quart de l’étude)….

Introduction

La mort en 1192 d’Agathe de Pierrefonds 1 marque un tournant dans l’histoire de la féodalité à Pierrefonds. Héritière de l’immense domaine des puissants seigneurs de Pierrefonds, elle meurt sans enfants de son mari Conon de Nesle, comte de Soissons. Plus jamais le titre de « seigneur de Pierrefonds » ne sera porté. A la lumière des documents de l’Ancien Régime le Pierrefonds féodal apparaît ensuite morcelé entre une multitude de fiefs de taille et d’importance variable, détenus à la fois par des particuliers et par des établissement religieux. Cet article vise à présenter la situation féodale de Pierrefonds à partir du XIIIè siècle, notamment grâce au dépouillement de certains cartons des archives de l’apanage d’Orléans concernant Pierrefonds, jusqu’ici peu utilisés par les historiens locaux 2.

Liste des fiefs

La première liste exhaustive des fiefs de la châtellenie de Pierrefonds, et donc de ceux qui étaient situés sur le terroir de Pierrefonds, est le dénombrement du duché de Valois en 1376 3. S’il est possible d’identifier dans ce document certains des fiefs mentionnés dans les documents postérieurs (c’est le cas notamment du Grand Autreval, du Petit Autreval ou de Bournonville), ce n’est que la masse des documents des XVIè et XVIIè siècles qui permet d’en dresser une liste complète et nominative – avec un total de pas moins de dix-neuf fiefs !

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La « maison » de Beauvoir à Orrouy, ancienne possession des Templiers

Lors du procès des Templiers en 1307 est citée la maison qu’ils possèdent à Orrouy (« domus de Oratorio super Autonem »), dont le précepteur était alors Pierre de Villers Adam. Cette maison n’était autre que l’actuelle ferme de Beauvoir. En effet, dans une déclaration des biens appartenant aux religieux de Bourgfontaine datée de 1595 et conservée aux Archives Nationales (R4/175), on lit :

« Le fief de Beauvoir, séant à Orrouy. Aussy à cause de leur primitive fondation  leur appartient ung fief et seigneurie séant en la parroisse d’Orrouy en la vallée d’Authonne nommé Beauvoir tenu et mouvant du Roy à cause de son chastel de Crespy. Auquel fief lesdits religieux ont justice foncière qui fut jadis aux Templiers et consiste icelluy fief en ung hostel, granges, estable, bergerie, lieu et pourpris comme il se comporte le tout fermé de murs (…) ».

On retrouve dans le document de 1595 la mention d’autres propriétés de l’abbaye de Bourgfontaine ayant appartenu aux Templiers, avec à chaque fois le rappel qu’il s’agit de biens attribués lors de la « primitive fondation » de l’abbaye : leur fief de « Sennevières en Mulcien (…) qui fut jadis aux templiers (…) vulgairement appelé le Temple » (Sennevières, commune de Chèvreville, canton de Nanteuil-le-Haudouin, Oise) et une ferme avec colombier à Mortefontaine également appelée le Temple (Mortefontaine, canton de Vic-sur-Aisne, Aisne).

La fondation de l’abbaye de Bourgfontaine, dont il est question dans le texte, date de 1323, c’est à dire un peu moins de dix ans après la chute des Templiers et la confiscation de leurs biens. A. Moreau-Néret a détaillé dans un article publié en 1967 par la Société Historique Régionale de Villers-Cotterêts comment ces biens des Templiers avaient contribué à la fondation de l’abbaye de Bourgfontaine.

Un autre document conservé aux Archives Départementales de l’Oise (H3618) au sein des volumineuses archives de la chartreuse de Bourgfontaine est un « inventaire et extraits des titres et pièces de la terre et seigneurie de Beauvoir », qui mentionne un grand nombre de documents aujourd’hui perdus. C’est ainsi qu’on connait un grand nombre de baux de la maison de Beauvoir :

  • 7 janvier 1478 : bail pour 18 ans à Pierre Ducher, moyennant le paiement annuel de 14 livres, un setier de pois et un setier de noix.
  • 6 janvier 1491 (sic) : bail pour 25 ans au même Pierre Ducher
  • 10 avril 1535 : bail pour 9 ans à Mahieu Ducher
  • 18 avril 1543 : bail à Christophe Ducher, aux mêmes conditions que le bail précédent
  • 14 décembre 1549 : bail pour 9 ans à André Drouart
  • 20 janvier 1566 : bail à Jacques Dupuis
  • 19 décembre 1576 : bail à Nicolas Baudequin
  • 7 juillet 1579 : bail à Martin Baudequin
  • 3 juin 1606 : bail à Jean Mesnil
  • 7 juillet 1614 : bail à la veuve et aux enfants de Jean Mesnil
  • 1 avril 1620 : bail à Pierre de Blesson
  • 26 mars 1624 : transport du bail à Laurent Dubois

La « Grand’Maison » de l’évêque Pierre d’Ailly à Morienval (1400)

Le nom du cardinal Pierre d’Ailly est familier des habitants de la région de Compiègne, où un lycée porte son nom. Originaire de Compiègne, Pierre d’Ailly possédait des biens aux alentours, et notamment à Morienval. En parlant du « fief de la Grand’Maison », également appelé le « fief de Chastres », situé à Morienval, l’historien du Valois Carlier écrit d’ailleurs : « J’ai lu dans un dénombrement de 1400 que ce fief fut à maître Pierre d’Ailly, évêque de Cambrai ». Aubrelicque, dans une étude biographique sur le Cardinal d’Ailly, paru dans un Bulletin de la Société Historique de Compiègne, mentionne le même document, qu’il date de 1402 et qualifie de vente.

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Effectivement, deux copies d’un tel document existent et sont conservées aux Archives Nationales, dans les archives de l’apanage d’Orléans (Archives Nationales, R4/101). Carlier a raison sur la date, puisque l’acte a été rédigé en septembre 1400, mais Aubrelicque a raison sur le fait qu’il ne s’agit pas d’un dénombrement: il s’agit d’une donation. L’un des deux exemplaires du document, daté de septembre 1400 et rangé dans une liasse concernant le fief de « La Grand’Maison » ou « de Chastres » à Morienval, nous montre « Pierre, évêque de Cambray, comte de Cambrésis«  donner aux religieux de Saint-Pierre-en-Chastres une « maison jardin vivier vingne grange et coulombier et tout le lieu Monseigneur l’évêque avoit séans en la ville de Morgneval », ainsi que les revenus (cens, rentes, revenus) qui s’y rattachaient. Ce don n’avait d’autre contrepartie que le devoir pour les religieux de Saint-Pierre-en-Chastres de faire dire 3 messes par an pour le roi, une pour Pierre d’Ailly, et une pour Colart d’Ailly et sa femme Péronne, ses père et mère. Un autre document de la même liasse, daté du 15 septembre 1400, nous apprend qu’il s’agit d’un fief et l’inféode aux religieux de Chastres.

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Le Valois féodal : le fief du Petit Autreval à Pierrefonds

Il y avait à Pierrefonds sous l’Ancien Régime un grand nombre de fiefs, d’importance variable (le Grand Autreval, Champbaudon, Branges et Haucourt, Ruisseaux, la Follye, Le Bois des Darrideaux, Belliole, Bournonville, Hermerel, Verneuil, …) L’histoire de ces fiefs est en partie connue grâce à des séries de documents féodaux conservés en série R4 aux Archives Nationales, et grâce aux minutes des notaires des XVIIè et XVIIIè siècle. Parmi ces fiefs, le Petit Autreval, dont l’hôtel seigneurial était situé au lieu qui est toujours connu aujourd’hui sous ce nom.

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Situation du Grand et du Petit Autreval à Pierrefonds © Géoportail, IGN

Introduction

Le fief du Petit Autreval était l’un des deux fiefs situés à Pierrefonds qui relevait de la seigneurie de Montgobert (avec le fief de Bournonville) . Aucun droit n’était attaché à ce fief. Le revenu des cens attachés au domaine concédé était de quatre deniers par essin. L’histoire du Petit Autreval est assez bien connue grâce à plusieurs aveux et dénombrements conservés aux Archives Nationales et aux Archives Départementales de l’Oise.

Maison seigneuriale Lire la suite

Jean de Longueval, capitaine du château de Villers-Cotterêts, et sa seigneurie de Chavres (1569 – )

Après un premier billet consacré à Guillaume du Sable, le deuxième est consacré à un autre personnage du Valois qui a fréquenté durant une grande partie du XVIè siècle la cour des rois de France : Jean de Longueval, qui fut capitaine de Villers-Cotterêts et de la forêt de Retz, et écuyer tranchant des rois Henri II et François II.  Les deux personnages se connaissaient puisque Guillaume du Sable rédige une épitaphe pour Jean de Longueval dans « La Muse Chasseresse », dans laquelle on apprend qu’il serait mort (en 1583) à … 105 ans (ce qui, au vu des autres éléments biographiques en notre possession, semble plus que douteux) et aurait servi … 6 rois (Guillaume du Sable se targuait quand à lui d’en avoir servi pas moins de 8, depuis François 1er) :

Cent cinq and j’ai vécu, ô bel âge
Heureux, ayant l’honneur d’avoir servi six rois,
Dont généreusement j’ai milité sous trois
Quarante ans pour le moins, jusqu’au chenu pélage,
Pour mon commencement, fis mon apprentissage
Dessous Louis douzième, à Ravenne, où j’étois
Ce bon roi mort, je vins à ce grand roi François
Puis à Henri second, son fils, prince très sage.
les trois autres rois sont les enfants d’icelui;
François, Charles, Henri, régrant pour le jourd’hui;
Et sous lequel acquis j’ai cette sépulture
Car ayant atteint l’âge de la décrépité,
Où l’homme enfant revient, par la mort suscité,
Pour payer le tribut à l’humaine nature.

Jean de Longueval a fait l’objet de deux notices, dans un Bulletin de la Société Historique de Villers-Cotterêts publié en 1964, l’une d’A. Moreau-Néret et l’autre de R. PatryJean de Longueval n’était pas originaire du Valois : les différents documents le mentionnant indiquent que si il possédait dans le Valois la seigneurie de Chavres (aujourd’hui hameau de Vauciennes, Oise. Seigneurie acquise en 1569, voir ci-dessous), il possédait principalement la seigneurie de Montgeroult (Val d’Oise) par héritage de sa mère, Jeanne de Dampont, marié à un seigneur du nom de Longueval dont on ignore le prénom (on pourra à ce sujet se référer à la « Notice Historique sur Montgeroult », rédigé en 1873 par Loisel, curé de Montgeroult). Jean de Longueval possédait aussi la seigneurie de L’Espine (non localisée), ainsi que des fiefs dans le Santerre (Rethonvillers, Le Quesnel). Il ne possédait en revanche pas le fief de la Muette, à Largny-sur-Automne, comme cela a pu être écrit par A. Moreau-Néret, puis rectifié par D. Rolland, qui a consulté aux Archives Nationales la liasse consacrée à la Muette conservée en série R4. La confusion vient peut-être du fait que La Muette avait appartenu à la famille de la femme de Jean de Longueval, les du Haste (famille d’origine roturière, originaire des environs de Gilocourt), avant d’être cédée à Louise de Longueval, fille de Jean, et son mari René de Blajan. Lire la suite